Un goût d'éternité 6e partie : Otto : 1962-1963 (1).

 

1962-1963

Giacomo Perretti revenait des courses. Même le plus grand, le plus stoïque des philosophes devait se nourrir malgré le deuil qui le frappait. Il lui fallait poursuivre tant bien que mal une existence normale.

L’Italien était chargé de multiples paquets, de sacs en papier pleins de victuailles et de filets à provisions en coton contenant quelques légumes et agrumes, des pommes de terre, des oranges, des poireaux et ainsi de suite. 

 Filet à provisions

Le journaliste était si encombré qu’il peinait à monter les escaliers d’un immeuble ordinaire du centre de Rome. Giacomo habitait au troisième étage un appartement arrangé avec goût et meublé avec amour par la défunte Maria. 

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Mais pourquoi monter à pieds jusqu’au troisième ? L’ascenseur était en panne depuis deux jours déjà et le réparateur tardait à venir.

Or, voici qu’une âme charitable se proposa aimablement d’aider Giacomo à porter quelques-uns de ses paquets et de ses filets. Tout en donnant son accord, Giacomo n’avait pas vraiment observé le jeune homme qui l’avait délesté d’une partie de sa charge.

Parvenu au seuil de son appartement, le philosophe voulut remercier l’inconnu. Relevant la tête, il le dévisagea alors que le jeune homme se présentait.

- Je suis un ami d’Otto von Möll et de Franz von Hauerstadt, commença l’homme blond de bonne taille. Peut-être ces derniers vous ont-ils parlé de moi. Je me nomme Michaël Xidrù.

A l’énoncé de l’identité de l’étranger, Perretti l’observa encore davantage, fronça ses sourcils deux ou trois secondes, pas davantage, parut supporter le choc et se décida enfin à répondre dans un sourire.

- Monsieur Michaël, je vous remets parfaitement. Je sais qui vous êtes, ce que vous êtes. Mais, entrez donc. Vous n’allez pas rester ainsi sur le palier. D’autant plus que vous êtes venu de fort loin afin de me rencontrer. Je suppose que vous avez des informations importantes à me donner… et que celles-ci ne doivent pas être entendues par n’importe qui…

- En effet.

Après les civilités d’usage, les deux hommes se retrouvèrent attablés devant un verre de chianti dans le coin de la salle de séjour qui servait de salon. Giacomo Perretti peinait à conserver sons équanimité, prodigieusement intéressé et ébranlé par le défi que représentait la présence de l’agent temporel en ces lieux. 

 Fiasques

Toutefois, l’Italien avait retrouvé toute sa volubilité et ses paroles coulaient et coulaient aux oreilles de Michaël. Il mitrailla de questions son extraordinaire interlocuteur, savourant toute la chance qu’il avait de pouvoir dialoguer avec un être venant d’un futur assez lointain. Les phrases fusaient à une cadence folle.

Mais c’était Giacomo qui faisait tous les frais ou presque de cet échange, ne laissant pas l’agent temporel en placer une.

Michaël, amusé en son for intérieur, se contentait d’écouter. Il répondait avec parcimonie, attendant que le journaliste eût retrouvé son calme. Enfin, l’Italien se mit à aborder le cas Edgar P. Jacobs. 

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- Monsieur Michaël, le dessinateur belge a imaginé et dessiné une machine capable de franchir les vagues du temps, un chronoscaphe comme il l’a appelé. Or, lors de ses déplacements temporels, ledit vaisseau se retrouva confronté aux différentes variations du spectre lumineux. En effet, le dessinateur est parti du principe suivant : la lumière n’est pas la même selon l’époque à laquelle le chronoscaphe, le vaisseau qui franchit les frontières du temps, atterrit. Ainsi, l’engin baigne tour à tour dans une lumière proche des infrarouges ou des ultraviolets selon qu’il se retrouve dans le passé ou dans le futur. Vous vous imaginez combien ce détail m’a frappé. Edgar P. Jacobs est parvenu seul à ce raisonnement.

- Je suis au courant, lança placidement l’agent temporel.

- En 1960, peu avant le décès de William O’Gready, j’ai participé à l’expédition menée par Otto et son petit-fils en 1925, expédition effectuée à bord du translateur mis au point à la fois par Franz von Hauerstadt et par mon vieil ami. Les phénomènes visuels que nous avons observés ont été exactement les mêmes que ceux imaginés par le dessinateur belge. N’est-ce pas là une coïncidence fantastique ? Qu’en pensez-vous ?

D’un air détaché, presque frisant la désinvolture, Michaël répondit lentement.

- Monsieur Jacobs est tout simplement un être exceptionnel, un génie. Certes, il n’a aucune formation scientifique, mais il a pressenti la Réalité et l’a approchée de beaucoup plus près que tous les chercheurs et physiciens que sont vos contemporains. Je connais la forme du chronoscaphe. Je me suis penché sur les dessins, les brouillons d’Edgar P., oui, l’engin ressemble au translateur. Cela est fort logique, croyez-moi. Toutefois…

- Toutefois, quoi ?

- Tous ces appareils, toutes ces machineries sont encore bien archaïques et peu pratiques pour se déplacer dans le Temps, ou, plutôt, dans les Temps. Lors de vos recherches métaphysiques au Tibet, monsieur Perretti, vous avez découvert la clef pour changer d’époque sans cet apport technologique encombrant.

- Euh… Je ne sais si ce que j’ai lu peut honnêtement fonctionner.

- Voilà ! Vous hésitez à ouvrir la serrure du déplacement instantané à travers l’hyperespace. Votre esprit cartésien s’y oppose, malgré vous. Vous êtes en fait victime de votre époque, de ce que l’on vous a inculqué dans votre jeunesse.

- Mais, Michaël, objecta Giacomo, je n’ai rien découvert du tout. Je me suis contenté de lire des ouvrages ésotériques, de prendre des notes. Je me suis modestement intéressé à comprendre la conception du temps chez les anciens Tibétains, chez certains initiés.

- Giacomo, ne me décevez pas davantage ! le Temps, ou les Temps, n’ont pas qu’une unique direction. Ils ne coulent pas dans un seul sens. Du passé vers l’avenir. Surtout, ils ne sont pas qu’une route sans obstacle qui se déroule, immuable, toute tracée, avec un point de départ défini, perdu quelque part dans l’éternité pour vous, simples Homo Sapiens, et une arrivée invisible dans l’Infini d’un futur inimaginable. 

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- Que voulez-vous dire ? Demanda l’Italien timidement.

- Ceci. Le Temps est une spirale, spirale qui s’enroule mais aussi se fragmente pour former à son tour d’autres spirales encore et encore. Le cercle ainsi brisé se multiplie sans cesse, engendre d’autres cercles, toujours davantage, sans fin. Ainsi, 1962 se déroule en même temps, simultanément avec 772, mais dans un autre espace, dans une autre dimension. Vous avez bien conscience que l’Univers se déplace, n’est-ce pas ?

- Oui, enfin, je crois…

- Tenez… en cette seconde où je vous parle, où cet échange a lieu, je suis bien à vos côtés, présent, matérialisé en chair et en os, dégustant à petites gorgées ce verre de chianti, dans une attitude ma foi, décontractée, comme si rien ne me préoccupait davantage… pour un esprit prosaïque, il est tout à fait impossible que je sois parallèlement, donc aussi, en 1995. Or, c’est justement le cas ! Je suis bien également en Californie, à Caltech. Il sept heures du matin et je prends mon petit-déjeuner avec un Stephen des plus bougons. Laissez-moi vous dire que le chianti mêlé à du jus d’ananas et des céréales au miel, c’est assez déroutant comme mélange !

- Je veux bien l’admettre.

- Ne mettez pas en doute mes paroles, Giacomo. Quel intérêt aurais-je à vous mentir ? Non, mon but est de parfaire votre éducation, d’affuter votre esprit. Mais assez parlé de moi. Pour que vous compreniez ma démonstration, je vais prendre des exemples historiques que vous connaissez. Ainsi, en cette année 772, Charlemagne vient de pénétrer en Saxe.

Illustration. 

 Tout naturellement, le roi des Francs

 Illustration.

 ignore que, dans le même espace terrestre, mais pas cosmogonique, bien sûr, car, alors la dimension Temps n’est plus tout à fait la même, plus tout à fait identique – elle a alors tendance à se complexifier – les Alliés marchent vers Berlin en cette année 1945. Ils s’apprêtent à faire leur jonction. Oui, je le répète, tout se déroule en même temps, à l’échelle quantique, tout est mêlé, tout s’interpénètre. Il me suffirait d’un claquement de doigt, pas plus, pour vous transporter devant le futur Empereur, ou pour que vous voyiez l’Univers tel qu’il est véritablement, réellement, dans son chaos multiforme, changeant, non dompté. Je pourrais faire mieux encore.

- A quoi pensez-vous ?

- Plus exactement, quelle période ai-je en tête ? Rectifia Michaël. Ce serait amusant et empli de leçons sur la relativité de toutes choses de vous montrer l’ère secondaire, le Jurassique ou le Crétacé.

 Description de cette image, également commentée ci-après

 Des âges bien différents de ceux décrits habituellement par vos paléontologues, je vous assure… des paléontologues malhabiles pas encore tout à fait conscients de toutes leurs lacunes. Mais il n’en va pas de leur faute… Cette science est encore balbutiante.  

- Que tentez-vous de me faire comprendre ? D’enraciner dans ma pensée ? Le Temps ne serait qu’une sorte de kaléidoscope dont les mouvements aléatoires, les vagues, les éclipses, les tourbillons se reflèteraient à l’infini, chaque reflet déformant un peu plus à chaque fois la Réalité ?

- Une Supra Réalité, corrigea l’agent temporel.

- Donc une Supra Réalité seulement appréhendable par Dieu ?

- Disons par une Supra Intelligence englobant le Tout.

- Ainsi, chaque fragment, chaque parcelle de ce Miroir pourrait se situer dans un Univers parallèle, semblable ou différent du nôtre en cet instant.

- En quelque sorte.

- Il me vient une analogie en tête. Voyez cette maison. Elle est fort ancienne. En fait, elle a connu le Quattrocento. Dans cette salle de séjour, à ce que raconte les légendes, Ludovic Sforza, de passage à Rome, aurait reçu, plus ou moins secrètement, un représentant de Sa Sainteté. Or, si je dois accepter vos paroles, cette scène se déroulerait maintenant, en cet instant ? Ai-je bien saisi ? Cela signifierait que je suis en train de naître et de mourir à la fois… en même temps. C’est effrayant.

- Je comprends votre effroi.

- Ah ! Tout se met à tourner dans mon esprit. Tout se trouble. J’ai besoin de prendre un peu de temps pour assimiler tout ce que vous me dîtes, toutes les implications de vos révélations.

- Monsieur Perretti, à l’échelle quantique, le Temps n’existe pas, la Vie n’existe pas, la Mort non plus en tant que bornes définies. Il n’y a pas d’Entropie. Avant de naître, vous existez. Après votre décès, vous poursuivez votre existence, tout simplement. Mais à une autre échelle, dans d’autres dimensions. Surtout, n’allez pas me dire que vous recommencez éternellement les mêmes gestes durant toute votre vie, prisonnier d’un livre écrit à jamais, un livre que le lecteur ouvrirait au hasard à la même page maintes et maintes fois, dans une sempiternelle ronde… 

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- Sur ce point, je ne sais si je dois être en adéquation avec vos propos. Tout cela m’échappe encore.

- Faites un effort, Giacomo. Vous y êtes presque. Vous êtes bien réel, autant que moi. Vous touchez tous les objets qui vous entourent, vous sentez leur matérialité. Vous êtes ici et maintenant, à mes côtés. Vous me tâtez pour vous assurer que tout cela n’est pas un leurre, que vous n’êtes pas victime d’une manipulation cosmique.

- Euh… oui.

- Non. Je vous assure que vous ne dormez pas, plongé dans un rêve sidérant. Entendu ?

- Oui, oui, balbutia Perretti.

- Bien. Alors, allons plus loin encore. Maintenant, ôtez le Temps. Supposez un Univers sans Temps. Quelle est votre conclusion ?

- Vous n’existez pas. Je n’existe pas non plus parce que tous deux, nous dépendons de ce Temps.

- Presque. Effectivement, nous n’existons pas, ou du moins sous cette forme, en tant qu’individus distincts et parfaitement définis. Compris ?

- A peu près.

- Maintenant, nous pouvons réinjecter la Dimension Temps dans cette Univers, un fragment d’un Univers beaucoup plus vaste et différent. En lui donnant sa pleine et entière définition. Vous existerez… mais, en plus, vous aurez hérité de la Liberté… du libre arbitre plus exactement. Alors, vous obtiendrez le pouvoir d’agir à votre guise. De modifier tout ce qui vous entoure encore et encore, de bouleverser la logique…

- Ouille ! Mais c’est… dangereux, émit naïvement Giacomo.

- Certes. D’autant plus qu’il y a, au-dessus de vous, quelqu’un ou quelque chose qui pourrait empêcher votre expérience d’aboutir si, jamais, vous alliez trop loin en rejetant les lois de l’Harmonie universelle.  

- Je m’effacerais ?

- A tout le moins, vous perdriez la conscience, le souvenir de vos essais…

- Ne pas aller trop loin… car je pourrais détruire tout ce qui n’est pas encore, tout ce qui sera, tout ce qui fut… qui doit être…

- Toutes les possibilités, tous les potentiels… tout ce qui est envisageable… le chemin le plus suivi, le sentier qui est ignoré mais pourtant si intéressant…

- D’accord. Sommes-nous à Rome, présentement, Michaël ?

- Tout comme moi, vous voyez la ville telle qu’elle doit être ici et maintenant en ce début du mois de janvier 1962, selon votre calendrier. Vos sens ne vous trompent pas. Vous croyez être à Rome. Mais ouvrez votre œil interne. Observez mieux. Qui voyez-vous en cette seconde ? Devant vous, ou, plutôt à votre place, se tient Antonio della Chiesa. Identifiez-le. 

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- Je le reconnais.

- Vous vous reconnaissez. Nous ne sommes plus à Rome mais à Naples, deux siècles plus tôt. Mais ce n’est pas fini encore. Remontez le temps de vos souvenirs. Désormais, c’est le moine Fra Vincenzo… mais rassurez-vous. Il s’agit toujours de vous. Continuons d’aller plus loin dans le passé de cette chronoligne. Alors… qui voyez-vous ? Que voyez-vous ?

- Cela ressemble à un monastère tibétain. 

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- L’un des premiers… Nous sommes dans la salle des contemplations. Agenouillé en prière, près de la statue en or de Bouddha, il y a un moine au crâne rasé avec soin, vêtu d’une robe jaune safran. Il médite depuis de longues heures déjà. Mais que découvre-t-il donc ? Le Temps est Tout, oui, il est le Tout, qu’il gouverne ; il commande l’Univers… le Multivers. Or, ce moine…

- C’est moi ! S’écria Giacomo avec émotion.

- Fort de cette reconnaissance, vous allez écrire un traité sur la transmigration des âmes. Oui, Giacomo, vous allez être tous ces êtres, vous allez vivre en plusieurs lieux à la fois, en différentes époques. Mais il ne s’agit pas de simple métempsychose.

- Je ne sais que penser…

- Vous êtes fasciné.

- Oui… Bien plus encore.

- Pour aujourd’hui, c’est assez.

- Euh… Oui… mais, je ne me trompe pas… désormais, c’est vous qui êtes troublé.

- En effet. Moi, qui suis-je ? Michaël Xidrù, un agent temporel originaire du 41ème millénaire ? Ou plus ou moins encore ? Dévisagez-moi avec soin. N’ayez crainte, je ne me montrerai pas offusqué.

- Vous avez un air de ressemblance avec Stephen Möll. C’est étrange.

 - Une explication sommaire vous dirait que je suis son descendant lointain. Les Sages m’ont donné cette apparence, du moins lorsque je suis incarné en Homo Sapiens.

- Cette explication n’est donc pas la bonne ?

- Elle est incomplète, mon cher Giacomo. Moi, je n’hésite pas à dire que je suis Stephen Möll, un Stephen qui a subi d’innombrables mutations, qui a vieilli et appris, qui a vu des millions et des millions d’êtres, qui a vécu des milliers et des milliers de siècles et qui, pourtant, ô paradoxe, est plus jeune que le Stephen original, celui qui vit et demeure au XXe siècle.

- En êtes-vous certain ?

- Oh que oui ! Giacomo, j’ai découvert cela. Mon esprit s’est ouvert, tout comme le vôtre est en train de le faire. Vous n’avez pas idée combien cela m’a fait mal. Pas que physiquement.

- Pourquoi ?

- Parce que je ne suis pas que Stephen et Michaël… je suis vous également. En m’observant, vous avez un exemple de ce que vous serez dans quelques quarante mille ans et ce que vous pourrez accomplir alors. Je vous ai aussi montré ce que vous avez été, ce que j’ai été, dans un passé que vous pouvez toucher, dans lequel vous pouvez vous rendre car il se trouve à portée de main. Il suffit de vouloir le saisir.

- Que sommes-nous donc exactement ?

- Ici, des images, des fragments de lumière. La Lumière, énergie intelligente à l’origine du Monde, son Moteur… nous sommes la Vie… dans toute sa diversité, dans tout son accomplissement. Ce que vous ressentez, je le ressens aussi. Nous sommes l’Univers en expansion,

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 en régression, nous sommes… le fiat lux de la Bible… les battements de cœur du Multivers, la toile sans cesse remise en chantier sur son chevalet, esquisses et aboutissements de ce qui est, de ce qui sera… Tour à tour, nous sommes pré particules,

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 atomes, cellules, herbe, animal, homme, Homo Spiritus, Entité incommensurable, incontournable… qui expérimente, qui cherche, qui se cherche… qui naît, qui meurt, qui recommence et jamais ne se lasse de cette tapisserie, toujours la même et pourtant toujours autre… lorsqu’un être humain trépasse, je meurs aussi. Je partage tout de lui, je suis lui. Dans une ronde qui ne cesse pas, qui ne le peut. Mais si ma conscience s’est ouverte, elle n’a pas atteint encore la Conscience Totale… elle n’en est qu’à ses premiers pas…

- Vous avez peur ?

- Oh oui ! Je marche vers cette Connaissance absolue comme un jeune enfant en train de trébucher. J’ai cette peur si bien chevillée dans tout mon être que je me refuse à aller jusqu’au bout de cette mutation. Nous sommes, que nous le voulions ou non, une partie de la Pensée universelle. Oui, je l’affirme, nous sommes l’Intelligence, une intelligence encore prisonnière, encore liée par sa matérialité même, une matérialité voulue ?

- Matérialité voulue ? Pourquoi ce terme ?

- Parce qu’à l’aube du Monde, l’Energie Primordiale, l’Expérimentateur, Dieu comme vous l’appelez, s’est dispersé, et, par un bouleversement qu’Il avait désiré, s’est répandu dans cet Univers Multivers qu’il venait tout juste de créer… afin de…

- S’identifier à lui ? De mieux le cerner ?

- De le comprendre… d’être en Empathie avec lui… en Fusion, en Communion… Il lui a suffi de vouloir… et le Temps a existé… Il est le Pan Chronos… par excellence. Nous, issus de cette création, nous tendons à retrouver cette Unité primitive, cette dimension divine.

- Vous croyez donc en Dieu ?

- Je crois en une Volonté supérieure… en un Sculpteur qui cherche, manipule, modèle et jamais n’est satisfait de ce qu’il obtient. Un Grand Ordonnateur dont le dessein final nous échappe, m’échappe.

- Un Dieu inabouti ? Qui se joue de nous ? Comme celui de l’Ancien Testament ? 

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- Non… il n’est pas colère, il n’est pas châtiment. Il veut la Perfection… il craint tant la Solitude… il remettra sur la Roue de la Création son ouvrage, tout recommencera, encore… Toujours, et cela n’aura pas de fin.

- D’autres cycles, Michaël ? Dois-je me réjouir de savoir cela ?

- Il vaut mieux qu’il y ait quelque chose plutôt que Rien, non ? Oh ! Pardon… mais je suis obligé de vous quitter, Giacomo. Je dois regagner la Californie à la fin de ce siècle, de cette chronoligne. L’Ennemi Johann van der Zelden s’apprête à commettre plus qu’une mauvaise action. Il va passer à la dimension supérieure.

- Vous reverrai-je bientôt ?

- Oui, vous me reverrez, Giacomo, je vous le promets. Dans quelques années pour vous, dans quelques semaines pour moi.

Déposant son verre de chianti sur la table, Michaël prit le temps de serrer amicalement la main du philosophe puis se dématérialisa brusquement, sans prévenir, ayant hâte de contrer les agissements de l’Ennemi. Le journaliste italien mit de longues heures à se remettre de cette entrevue, de ce que Michaël lui avait appris. Il en demeurerait changé à jamais.

 

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